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La place du stockage dans le système électrique français

Des technologies pouvant être complémentaires ou en concurrence entre elles

Le stockage pour répondre à un besoin de flexibilité du réseau électrique

Le système électrique français va présenter un besoin accru de flexibilité notamment dû à l’intégration d’une grande part d’EnR variable sur le réseau (voir article " Enjeux et trajectoires du mix électrique "). Les leviers de flexibilité qui sont à sa disposition regroupent des moyens agissant sur la production, sur la consommation, les interconnexions et le stockage.

Le stockage est en concurrence avec d’autres leviers de flexibilité. Celui à court-terme par batteries par exemple, est en compétition avec les effacements ou le déplacement de certaines consommations résidentielles (eau chaude sanitaire, recharge de véhicules électriques,...). Elles devraient également être en concurrence avec les nouvelles sources de flexibilités qui se développeront avec la transition énergétique, telles que les électrolyseurs, nécessaires aux besoins de stockage intersaisonnier (voir article power-to-gas, en cours de rédaction).

Le fonctionnement du système électrique repose sur deux catégories de services, contribuant à l’équilibre entre production et consommation et intervenant à différentes échelles de temps :

  • La « sécurité d’approvisionnement » qui consiste à dimensionner le système électrique de manière à assurer l’équilibre entre production et consommation « à tout instant », en respectant un critère de défaillance fixé, en espérance, à une durée moyenne annuelle de 3 heures du fait des déséquilibres entre l’offre et la demande électrique (article L. 141-7 du code de l’énergie).
  • Les « services système » qui consistent principalement à maintenir la fréquence et la tension proches de leur valeur nominale et à les ramener à cette valeur lors des aléas venant créer des déséquilibres entre production et consommation.
Congestion : apparait lorsque les flux d’électricité devant transiter sur une ligne sont supérieurs à ce que celle-ci est capable de transporter. Un phénomène de congestion sous-entend donc une exploitation non-optimale du système électrique car il est alors nécessaire de réduire l’injection d’une centrale de production (ou d’effacement) bien classée dans le programme d’appel des moyens de production et de compenser cette réduction par un autre moyen de production (ou d’effacement). Une congestion récurrente peut nécessiter un renforcement du réseau pour lever celle-ci de manière pérenne.

Le stockage peut assurer divers services pour le réseau, comme l’arbitrage (sur les marchés de l’énergie), le réglage de la fréquence, le réglage de la tension et le soutien au réseau (traitement des congestions). 

Les services systèmes permettent de répondre aux problématiques 2,3 et 4 du schéma ci-dessus. Source : étude "Futurs Énergétique 2050", RTE, 2021, p240.

 

Un besoin en stockage en croissance

A court terme, le déploiement du stockage de l’électricité n’est pas une priorité pour assurer l’équilibre offre-demande du réseau

Le stockage d’électricité est déjà présent de façon conséquente dans le système électrique à travers le stockage gravitaire hydraulique (lacs, STEP) – dont les gisements à développer apparaissent limités.
Les STEP sont actuellement utilisées pour le stockage infra-journalier voire hebdomadaire. Cependant avec l’intégration éolienne prévue dans les années à venir, le besoin en flexibilité hebdomadaire va augmenter (voir l’article " Enjeux et trajectoires du mix électrique "). Les STEP assureront alors ce service et le besoin de stockage infra-journalier pourra être assuré par les batteries.

Dans les conditions actuelles, un développement « de niche » du stockage par batteries apparaît économiquement pertinent pour la fourniture de services système, de l’ordre de 300 MW à l’échelle de la France continentale*. A horizon 2030, RTE anticipe un intérêt économique pour un gisement complémentaire de l’ordre de 1 GW de batteries disposant d’un temps de décharge de 2h.

*Source : RTE, Valorisation socio-économique des smartgrids, 2017.

Retours d'expérience

L’Allemagne est plus avancée sur les besoins en stockage du réseau électrique du fait d’un fort développement du photovoltaïque

Au niveau économique, le prix de l’électricité augmente et le prix des panneaux photovoltaïques et batteries baissent, ce qui rend l’optimisation de l’autoconsommation par un système de stockage couplé au photovoltaïque de plus en plus rentable. Ce développement est davantage poussé en Allemagne qu’en France, car le prix de l’électricité final pour les clients est plus élevé en Allemagne.

En Allemagne, la forte intégration du solaire photovoltaïque dans le réseau est notamment due à des mesures nationales, et conduit à de nouvelles incitations concernant les installations couplant photovoltaïque et stockage. Il y a une forte augmentation du nombre de batteries à domicile facilitée par des soutiens financiers. En effet, depuis mai 2013, l’Allemagne subventionne les installations couplant stockage et photovoltaïque pour l’optimisation de l’autoconsommation. Fin 2019, la capacité cumulée des batteries résidentielles s’élevait à 1 420 MWh pour 185 000 foyers équipés. Par ailleurs, au même moment, 620 batteries de grande taille étaient installées en Allemagne pour une capacité de 620 MWh*.

Si la France applique les mêmes mesures que l’Allemagne pour une capacité installée similaire, les premières lois en faveur du développement du stockage devraient survenir dans moins d’une dizaine d’années en France (36 GW dans le cas de l’Allemagne, ce qui correspond à l’objectif bas de la PPE à horizon 2028 pour la France).

*Source : Journal of energy storage, “The development of stationary battery storage systems in Germany” – status 2020, n°33, janvier 2021

Dans les prochaines années, l’évolution du besoin de flexibilité conduira à l’installation de nouvelles capacités de stockage

Les besoins en flexibilité vont avoir tendance à augmenter notamment du fait de l'accroissement de la production renouvelable variable. Dans la figure ci-dessous, les scénarios M0, M1 et M23 visent le 100 % EnR électriques à horizon 2050-2060, là où les scénarios N prévoient une relance plus ou moins importante du nucléaire.

  • Flexibilités intra-journalières : Le photovoltaïque ne produit que le jour, il induit par conséquent un besoin de flexibilité important à l'échelle de la journée, notamment pour compenser le déficit de production la nuit.
  • Flexibilités intra et inter-hebdomadaires : La production éolienne peut quant à elle varier significativement à l'intérieur d'une semaine, ou entres différentes semaines. Les flexibilités afférentes visent à répondre au déficit de production éolienne les jours et les semaines avec vent faible.
  • Flexibilités inter-saisonnières : Il y a plus de vent l'hiver, période à laquelle la consommation électrique est également plus forte. Inversement, le photovoltaïque produit davantage l'été où la consommation est plus faible. C'est pourquoi le photovoltaïque augmente les besoins de flexibilités inter-saisonnières là où l'éolien tend à les diminuer.

Le graphique ci-dessous permet de visualiser le fonctionnement d'un mix électrique français composé à 90 % d'énergies renouvelables variables à horizon 2050. Au sein d'une même semaine, certains jours sont particulièrement venteux, la production dépasse alors les besoins en consommation et les surplus sont stockés via du pompage-turbinage ou du power-to-gas, le reste est exporté lorsque cela est possible. Inversement, ces surplus sont déstockés les jours où le vent faiblit, par l'augmentation de la puissance hydraulique et l'utilisation de centrales thermiques CCG/TAC hydrogène (injection power-to-gaz-to-power).

Pour le photovoltaïque, une problématique similaire est rencontrée, mais à l'échelle du cycle jour/nuit. Les surplus de production sont en partie stockés dans des batteries lors du pic de production du midi pour être ensuite restitués pendant quelques heures en début de soirée.

Fonctionnement type d'un mix électrique français 90 % ENR variable à horizon 2050 lors d'une semaine où le vent est faible. Source : RTE, "Futurs énergétiques 2050", p289, https://assets.rte-france.com/prod/public/2021-12/BP2050_rapport-complet_chapitre7_

Pour bien comprendre ces deux graphiques, il convient de différencier les notions de capacité de stockage en puissance et de capacité de stockage en énergie. Les batteries délivrent une puissance importante mais pendant une très courte durée car elles ne possèdent pas une très grande capacité de stockage en énergie (dans une baignoire, le volume correspond à l’énergie, le débit du robinet et de l’évacuation à la puissance). A l’inverse, la technologie de power-to-gas donne accès à d’énormes capacités de stockage, notamment celles du réseau gazier (130 TWh, soit 25% de la production annuelle d’électricité actuelle).

Des technologies de stockage appropriées à chaque besoin

Le stockage peut s’effectuer à l’aide de divers moyens, qui se différencient notamment par leurs caractéristiques techniques et économiques. Chaque technologie est donc appropriée pour répondre à un ou plusieurs services spécifiques en fonction de la capacité et de la durée de décharge du système de stockage.

Une technologie unique ne peut pas répondre à tous les services du réseau électrique. C’est pour cette raison que différentes technologies de stockage devront se compléter pour assurer la réponse à divers services.

Les différents types de moyens de stockage peuvent être divisés en quatre grands groupes, à savoir, le stockage : mécanique (STEP, volant d’inertie, CAES), chimique (H2, méthane, batteries), électromagnétique (supraconducteurs, condensateurs) et thermique (chaleur latente, chaleur sensible, réseau de chaleur).

Au sein d’un même type, les technologies ne présentent pas forcément les mêmes caractéristiques techniques ou temporalité (temps de décharge et temps de réaction). En fonction de l’importance de ces durées, la technologie sera favorisée pour un stockage en puissance (durée de décharge faible, temps de réaction rapide) ou de masse (durée de décharge importante, temps de réaction plus lent).

Technologie

STEP

CAES

Li-Ion

Power-to-hydrogen-to-power

Puissance cible

qlqs MW à GW

100 à 500 MW

qlqs kW à 100 kW

1kW à 10MW

Rendement

65 à 80 %

50 %

70 à 75 %

25 à 35 %

Durée de vie

40 à 60 ans

30 à 40 ans

10 à 20 ans

5 à 10 ans (durée de vie électrolyseurs)

Coût d’investissement

500 à 1 500€/kW

500 à 1 000€/kW

600 à 1 500€/kW

6 000€/kW

Temps de décharge

24h

8h

30min-2h

Plusieurs mois

Temporalité

Infrajournalier et hebdomadaire

Infrajournalier

Infrajournalier

Intersaisonnier

Tableau : Réalisation Hespul, (2021), basée sur un mémoire de l’École Polytechnique de Louvain « Optimisations techniques et financières d’installations de production et de stockage d’électricité photovoltaïque »

Dernière Mise à jour : 27/02/2024
Article suivant Un besoin en stockage en croissance

A moyen et long terme, le réseau électrique français aura recours à des moyens de stockage en proportions relatives à la pénétration des EnR dans le mix

Le besoin de stockage inter-saisonnier dans un mix intégrant largement les EnR apparaît du fait d’une réduction des moyens de production pilotables, en plus d’une variation importante de la consommation (chauffage en hiver) et de la production (photovoltaïque en été) entre saisons. Pour un mix 100% EnR, le système électrique nécessitera des volumes importants de stockage inter-saisonnier de l’ordre de plusieurs dizaines de térawattheures.

Le type de stockage nécessaire dépendra de la part des sources EnR dans le mix. En effet, les fluctuations journalières de scénarios avec une prédominance du photovoltaïque induisent des besoins de stockage journalier et saisonnier, alors que des stockages hebdomadaires sont nécessaires pour les scénarios dominés par l'éolien. Ainsi, avec un système électrique basé principalement sur de l’éolien, les technologies telles que les STEP et l’hydrogène synthétique sont favorables, tandis que sur du solaire, ce sont les batteries Li-Ion qui sont à développer en priorité [Source : ScienceDirect, Journal of Energy Storage, Stefan Weitemeyer, David Kleinhans, Lars Siemer, Carsten Agert, “Optimal combination of energy storages for perspective power supply systems based on renewable energy sources”, 2018].  

*

Dernière Mise à jour : 27/02/2024
Article précédent Des technologies pouvant être complémentaires ou en concurrence entre elles
Article suivant Retours d'expérience

Les appels d’offres de la CRE dans les ZNI, conduisent à des projets alliant photovoltaïque et stockage


La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a lancé des appels d’offre (AO) concernant la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire et située dans les zones non interconnectées (ZNI). La volonté de décarbonation de l’énergie associée à au coût élevé de production d’électricité dans les ZNI, renforce la pertinence du développement du stockage sur ces territoires.
En 2019, les cahiers des charges totalisaient 400 MW d’ici 2023 pour l’ensemble des six territoires que sont la Corse, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion et Mayotte. Cela comprenait du photovoltaïque sur bâtiments et ombrières, ou au sol pour plus de 70 MW annuels, dont la moitié avec dispositif de stockage.

Dans les ZNI, le développement envisagé du stockage répondrait aux services d’arbitrage mais pas à celui de réglage de la fréquence. Au contraire, en France métropolitaine, aujourd’hui le seul service rentable que le stockage peut rendre est le réglage primaire de la fréquence. (Voir article services système)

Le besoin de stockage d’électricité se fait actuellement ressentir dans les ZNI pour accompagner le développement des énergies renouvelables et augmenter l’indépendance des îles face au pétrole. La France métropolitaine, qui bénéficie d’un territoire beaucoup plus vaste, avec des ressources variées et une interconnexion développée avec ses voisins européens, ne devrait pas avoir les mêmes besoins de développement des capacités de stockage avant longtemps. Cependant l’exemple des ZNI peut être analysé pour tenter d’anticiper les futurs besoins du réseau électrique européen.

 

En France métropolitaine, afin d’anticiper le rôle du stockage, RTE fait des expérimentations avec le projet RINGO

Le projet RINGO teste un système de stockage-déstockage de batteries pour, à terme, éliminer les congestions sur le réseau de transport, limiter les investissements dans le renforcement du réseau (reporter la construction de certaines lignes électriques) ainsi que l’écrêtement des centrales renouvelables et tester les performances des batteries. RINGO est un outil de « flexibilité » pour le réseau, il est pensé pour gérer un réseau intégrant de plus en plus d’EnR.

Source : PV-magazine, projet RINGO : la première batterie du plus gros stockage d’électricité en faveur du réseau en place, (octobre 2020).

Les tests se font sur trois sites munis de batteries. Pour que la mise en application évite tout impact sur l’équilibre offre-demande national, lorsqu’un ou deux sites se chargent, le ou les autres doivent se décharger d’un volume équivalent.

Afin de réagir très rapidement dans les situations de pics de production renouvelable ou de consommation, les batteries seront pilotées par un dispositif innovant appelé NAZA (nouveaux automates de zones adaptatifs). Ces automates captent, en temps réel, les données numériques du réseau et l’état de charge des batteries pour déclencher, à distance et en autonomie, les actions les plus appropriées. En effet, l’algorithme indique, à chaque instant, à chaque batterie, si elle doit stocker ou restituer de l’électricité.

Ce projet permet à RTE de renforcer et d’optimiser son pilotage du réseau électrique tout en anticipant un développement massif des EnR.

Dernière Mise à jour : 27/02/2024
Article précédent Un besoin en stockage en croissance

La place du stockage dans le système électrique français

Des technologies pouvant être complémentaires ou en concurrence entre elles

Le stockage pour répondre à un besoin de flexibilité du réseau électrique

Le système électrique français va présenter un besoin accru de flexibilité notamment dû à l’intégration d’une grande part d’EnR variable sur le réseau (voir article " Enjeux et trajectoires du mix électrique "). Les leviers de flexibilité qui sont à sa disposition regroupent des moyens agissant sur la production, sur la consommation, les interconnexions et le stockage.

Le stockage est en concurrence avec d’autres leviers de flexibilité. Celui à court-terme par batteries par exemple, est en compétition avec les effacements ou le déplacement de certaines consommations résidentielles (eau chaude sanitaire, recharge de véhicules électriques,...). Elles devraient également être en concurrence avec les nouvelles sources de flexibilités qui se développeront avec la transition énergétique, telles que les électrolyseurs, nécessaires aux besoins de stockage intersaisonnier (voir article power-to-gas, en cours de rédaction).

Le fonctionnement du système électrique repose sur deux catégories de services, contribuant à l’équilibre entre production et consommation et intervenant à différentes échelles de temps :

  • La « sécurité d’approvisionnement » qui consiste à dimensionner le système électrique de manière à assurer l’équilibre entre production et consommation « à tout instant », en respectant un critère de défaillance fixé, en espérance, à une durée moyenne annuelle de 3 heures du fait des déséquilibres entre l’offre et la demande électrique (article L. 141-7 du code de l’énergie).
  • Les « services système » qui consistent principalement à maintenir la fréquence et la tension proches de leur valeur nominale et à les ramener à cette valeur lors des aléas venant créer des déséquilibres entre production et consommation.
Congestion : apparait lorsque les flux d’électricité devant transiter sur une ligne sont supérieurs à ce que celle-ci est capable de transporter. Un phénomène de congestion sous-entend donc une exploitation non-optimale du système électrique car il est alors nécessaire de réduire l’injection d’une centrale de production (ou d’effacement) bien classée dans le programme d’appel des moyens de production et de compenser cette réduction par un autre moyen de production (ou d’effacement). Une congestion récurrente peut nécessiter un renforcement du réseau pour lever celle-ci de manière pérenne.

Le stockage peut assurer divers services pour le réseau, comme l’arbitrage (sur les marchés de l’énergie), le réglage de la fréquence, le réglage de la tension et le soutien au réseau (traitement des congestions). 

Les services systèmes permettent de répondre aux problématiques 2,3 et 4 du schéma ci-dessus. Source : étude "Futurs Énergétique 2050", RTE, 2021, p240.

 

Dans les prochaines années, l’évolution du besoin de flexibilité conduira à l’installation de nouvelles capacités de stockage

Les besoins en flexibilité vont avoir tendance à augmenter notamment du fait de l'accroissement de la production renouvelable variable. Dans la figure ci-dessous, les scénarios M0, M1 et M23 visent le 100 % EnR électriques à horizon 2050-2060, là où les scénarios N prévoient une relance plus ou moins importante du nucléaire.

  • Flexibilités intra-journalières : Le photovoltaïque ne produit que le jour, il induit par conséquent un besoin de flexibilité important à l'échelle de la journée, notamment pour compenser le déficit de production la nuit.
  • Flexibilités intra et inter-hebdomadaires : La production éolienne peut quant à elle varier significativement à l'intérieur d'une semaine, ou entres différentes semaines. Les flexibilités afférentes visent à répondre au déficit de production éolienne les jours et les semaines avec vent faible.
  • Flexibilités inter-saisonnières : Il y a plus de vent l'hiver, période à laquelle la consommation électrique est également plus forte. Inversement, le photovoltaïque produit davantage l'été où la consommation est plus faible. C'est pourquoi le photovoltaïque augmente les besoins de flexibilités inter-saisonnières là où l'éolien tend à les diminuer.

Le graphique ci-dessous permet de visualiser le fonctionnement d'un mix électrique français composé à 90 % d'énergies renouvelables variables à horizon 2050. Au sein d'une même semaine, certains jours sont particulièrement venteux, la production dépasse alors les besoins en consommation et les surplus sont stockés via du pompage-turbinage ou du power-to-gas, le reste est exporté lorsque cela est possible. Inversement, ces surplus sont déstockés les jours où le vent faiblit, par l'augmentation de la puissance hydraulique et l'utilisation de centrales thermiques CCG/TAC hydrogène (injection power-to-gaz-to-power).

Pour le photovoltaïque, une problématique similaire est rencontrée, mais à l'échelle du cycle jour/nuit. Les surplus de production sont en partie stockés dans des batteries lors du pic de production du midi pour être ensuite restitués pendant quelques heures en début de soirée.

Fonctionnement type d'un mix électrique français 90 % ENR variable à horizon 2050 lors d'une semaine où le vent est faible. Source : RTE, "Futurs énergétiques 2050", p289, https://assets.rte-france.com/prod/public/2021-12/BP2050_rapport-complet_chapitre7_

Pour bien comprendre ces deux graphiques, il convient de différencier les notions de capacité de stockage en puissance et de capacité de stockage en énergie. Les batteries délivrent une puissance importante mais pendant une très courte durée car elles ne possèdent pas une très grande capacité de stockage en énergie (dans une baignoire, le volume correspond à l’énergie, le débit du robinet et de l’évacuation à la puissance). A l’inverse, la technologie de power-to-gas donne accès à d’énormes capacités de stockage, notamment celles du réseau gazier (130 TWh, soit 25% de la production annuelle d’électricité actuelle).

Des technologies de stockage appropriées à chaque besoin

Le stockage peut s’effectuer à l’aide de divers moyens, qui se différencient notamment par leurs caractéristiques techniques et économiques. Chaque technologie est donc appropriée pour répondre à un ou plusieurs services spécifiques en fonction de la capacité et de la durée de décharge du système de stockage.

Une technologie unique ne peut pas répondre à tous les services du réseau électrique. C’est pour cette raison que différentes technologies de stockage devront se compléter pour assurer la réponse à divers services.

Les différents types de moyens de stockage peuvent être divisés en quatre grands groupes, à savoir, le stockage : mécanique (STEP, volant d’inertie, CAES), chimique (H2, méthane, batteries), électromagnétique (supraconducteurs, condensateurs) et thermique (chaleur latente, chaleur sensible, réseau de chaleur).

Au sein d’un même type, les technologies ne présentent pas forcément les mêmes caractéristiques techniques ou temporalité (temps de décharge et temps de réaction). En fonction de l’importance de ces durées, la technologie sera favorisée pour un stockage en puissance (durée de décharge faible, temps de réaction rapide) ou de masse (durée de décharge importante, temps de réaction plus lent).

Technologie

STEP

CAES

Li-Ion

Power-to-hydrogen-to-power

Puissance cible

qlqs MW à GW

100 à 500 MW

qlqs kW à 100 kW

1kW à 10MW

Rendement

65 à 80 %

50 %

70 à 75 %

25 à 35 %

Durée de vie

40 à 60 ans

30 à 40 ans

10 à 20 ans

5 à 10 ans (durée de vie électrolyseurs)

Coût d’investissement

500 à 1 500€/kW

500 à 1 000€/kW

600 à 1 500€/kW

6 000€/kW

Temps de décharge

24h

8h

30min-2h

Plusieurs mois

Temporalité

Infrajournalier et hebdomadaire

Infrajournalier

Infrajournalier

Intersaisonnier

Tableau : Réalisation Hespul, (2021), basée sur un mémoire de l’École Polytechnique de Louvain « Optimisations techniques et financières d’installations de production et de stockage d’électricité photovoltaïque »

Un besoin en stockage en croissance

A court terme, le déploiement du stockage de l’électricité n’est pas une priorité pour assurer l’équilibre offre-demande du réseau

Le stockage d’électricité est déjà présent de façon conséquente dans le système électrique à travers le stockage gravitaire hydraulique (lacs, STEP) – dont les gisements à développer apparaissent limités.
Les STEP sont actuellement utilisées pour le stockage infra-journalier voire hebdomadaire. Cependant avec l’intégration éolienne prévue dans les années à venir, le besoin en flexibilité hebdomadaire va augmenter (voir l’article " Enjeux et trajectoires du mix électrique "). Les STEP assureront alors ce service et le besoin de stockage infra-journalier pourra être assuré par les batteries.

Dans les conditions actuelles, un développement « de niche » du stockage par batteries apparaît économiquement pertinent pour la fourniture de services système, de l’ordre de 300 MW à l’échelle de la France continentale*. A horizon 2030, RTE anticipe un intérêt économique pour un gisement complémentaire de l’ordre de 1 GW de batteries disposant d’un temps de décharge de 2h.

*Source : RTE, Valorisation socio-économique des smartgrids, 2017.

A moyen et long terme, le réseau électrique français aura recours à des moyens de stockage en proportions relatives à la pénétration des EnR dans le mix

Le besoin de stockage inter-saisonnier dans un mix intégrant largement les EnR apparaît du fait d’une réduction des moyens de production pilotables, en plus d’une variation importante de la consommation (chauffage en hiver) et de la production (photovoltaïque en été) entre saisons. Pour un mix 100% EnR, le système électrique nécessitera des volumes importants de stockage inter-saisonnier de l’ordre de plusieurs dizaines de térawattheures.

Le type de stockage nécessaire dépendra de la part des sources EnR dans le mix. En effet, les fluctuations journalières de scénarios avec une prédominance du photovoltaïque induisent des besoins de stockage journalier et saisonnier, alors que des stockages hebdomadaires sont nécessaires pour les scénarios dominés par l'éolien. Ainsi, avec un système électrique basé principalement sur de l’éolien, les technologies telles que les STEP et l’hydrogène synthétique sont favorables, tandis que sur du solaire, ce sont les batteries Li-Ion qui sont à développer en priorité [Source : ScienceDirect, Journal of Energy Storage, Stefan Weitemeyer, David Kleinhans, Lars Siemer, Carsten Agert, “Optimal combination of energy storages for perspective power supply systems based on renewable energy sources”, 2018].  

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Article précédent Des technologies pouvant être complémentaires ou en concurrence entre elles
Article suivant Retours d'expérience

Retours d'expérience

L’Allemagne est plus avancée sur les besoins en stockage du réseau électrique du fait d’un fort développement du photovoltaïque

Au niveau économique, le prix de l’électricité augmente et le prix des panneaux photovoltaïques et batteries baissent, ce qui rend l’optimisation de l’autoconsommation par un système de stockage couplé au photovoltaïque de plus en plus rentable. Ce développement est davantage poussé en Allemagne qu’en France, car le prix de l’électricité final pour les clients est plus élevé en Allemagne.

En Allemagne, la forte intégration du solaire photovoltaïque dans le réseau est notamment due à des mesures nationales, et conduit à de nouvelles incitations concernant les installations couplant photovoltaïque et stockage. Il y a une forte augmentation du nombre de batteries à domicile facilitée par des soutiens financiers. En effet, depuis mai 2013, l’Allemagne subventionne les installations couplant stockage et photovoltaïque pour l’optimisation de l’autoconsommation. Fin 2019, la capacité cumulée des batteries résidentielles s’élevait à 1 420 MWh pour 185 000 foyers équipés. Par ailleurs, au même moment, 620 batteries de grande taille étaient installées en Allemagne pour une capacité de 620 MWh*.

Si la France applique les mêmes mesures que l’Allemagne pour une capacité installée similaire, les premières lois en faveur du développement du stockage devraient survenir dans moins d’une dizaine d’années en France (36 GW dans le cas de l’Allemagne, ce qui correspond à l’objectif bas de la PPE à horizon 2028 pour la France).

*Source : Journal of energy storage, “The development of stationary battery storage systems in Germany” – status 2020, n°33, janvier 2021

Les appels d’offres de la CRE dans les ZNI, conduisent à des projets alliant photovoltaïque et stockage


La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a lancé des appels d’offre (AO) concernant la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire et située dans les zones non interconnectées (ZNI). La volonté de décarbonation de l’énergie associée à au coût élevé de production d’électricité dans les ZNI, renforce la pertinence du développement du stockage sur ces territoires.
En 2019, les cahiers des charges totalisaient 400 MW d’ici 2023 pour l’ensemble des six territoires que sont la Corse, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion et Mayotte. Cela comprenait du photovoltaïque sur bâtiments et ombrières, ou au sol pour plus de 70 MW annuels, dont la moitié avec dispositif de stockage.

Dans les ZNI, le développement envisagé du stockage répondrait aux services d’arbitrage mais pas à celui de réglage de la fréquence. Au contraire, en France métropolitaine, aujourd’hui le seul service rentable que le stockage peut rendre est le réglage primaire de la fréquence. (Voir article services système)

Le besoin de stockage d’électricité se fait actuellement ressentir dans les ZNI pour accompagner le développement des énergies renouvelables et augmenter l’indépendance des îles face au pétrole. La France métropolitaine, qui bénéficie d’un territoire beaucoup plus vaste, avec des ressources variées et une interconnexion développée avec ses voisins européens, ne devrait pas avoir les mêmes besoins de développement des capacités de stockage avant longtemps. Cependant l’exemple des ZNI peut être analysé pour tenter d’anticiper les futurs besoins du réseau électrique européen.

 

En France métropolitaine, afin d’anticiper le rôle du stockage, RTE fait des expérimentations avec le projet RINGO

Le projet RINGO teste un système de stockage-déstockage de batteries pour, à terme, éliminer les congestions sur le réseau de transport, limiter les investissements dans le renforcement du réseau (reporter la construction de certaines lignes électriques) ainsi que l’écrêtement des centrales renouvelables et tester les performances des batteries. RINGO est un outil de « flexibilité » pour le réseau, il est pensé pour gérer un réseau intégrant de plus en plus d’EnR.

Source : PV-magazine, projet RINGO : la première batterie du plus gros stockage d’électricité en faveur du réseau en place, (octobre 2020).

Les tests se font sur trois sites munis de batteries. Pour que la mise en application évite tout impact sur l’équilibre offre-demande national, lorsqu’un ou deux sites se chargent, le ou les autres doivent se décharger d’un volume équivalent.

Afin de réagir très rapidement dans les situations de pics de production renouvelable ou de consommation, les batteries seront pilotées par un dispositif innovant appelé NAZA (nouveaux automates de zones adaptatifs). Ces automates captent, en temps réel, les données numériques du réseau et l’état de charge des batteries pour déclencher, à distance et en autonomie, les actions les plus appropriées. En effet, l’algorithme indique, à chaque instant, à chaque batterie, si elle doit stocker ou restituer de l’électricité.

Ce projet permet à RTE de renforcer et d’optimiser son pilotage du réseau électrique tout en anticipant un développement massif des EnR.

Article précédent Un besoin en stockage en croissance
Dernière Mise à jour : 27/02/2024

Publications


A voir également

Chapitre | Comprendre le système électrique
Enjeux et trajectoires du mix électrique